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Les pots de confiture

Édito publié le 13 mai 2018

GE, TU, ELLES. L’éditorial de Geneviève Béland.
Quand pensez-vous? Épisode 7
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Quand on entend parler de Val-d’Or ou de l’Abitibi-Témiscamingue, c’est souvent pour mettre en relief des aspects parfois rudes, rustiques, ou carrément burlesques. Les régions sont des marques: La Gaspésie, c’est un phénomène géologique, le Lac St-Jean, c’est un accent, la Montérégie, c’est des restants de découpage administratif et l’Outaouais, c’est… ben… euh, en-tout-cas. L’humain ne déteste pas simplifier lui permettant ainsi de ne pas trop s’enfarger dans les nuances du tapis. 

Dans les médias nationaux, on parle rarement de Val-d’Or (tout court) ou pour son audace et sa créativité. Par contre, je comprends facilement qu’une ville qui est définie principalement par une ressource naturelle offerte par les rois mages n’évoque pas instinctivement l’avant-garde dans l’imaginaire collectif.

Par contre, sachez qu’on vit en ce moment sur notre territoire une forme de révolution, une forte effervescence culturelle et entrepreneuriale, probablement attribuable en partie au fait qu’un vaste espace est accordé à la jeunesse dans le développement de celui-ci. Chez nous, tu peux te démarquer et prendre ta place avec ton baccalauréat en animation et recherche culturelles et ton trois semaines de stage chez Fantasia, ce qui n’est pas peu dire.

Souvent, après leurs études secondaires, plusieurs jeunes Valdoriens ressentent le besoin d’aller explorer ce qui se passe ailleurs. Ça inclut un segment non-négligeable de post-adolescents qui vont convaincre leurs parents que partir cueillir des fruits au B.C. et devenir végétariens à écouter trop de Propagandhi représente une opportunité de vie formatrice et valable. 

Le fait que plusieurs jeunes de chez nous se séparent de leurs parents assez tôt pour s’enrichir du monde extérieur semble expliquer qu’on ait affaire à une génération débrouillarde et moins complexée que la précédente par rapport aux grands centres. À leur retour, ils sont prêts à réinvestir leurs acquis: ils entreprennent, s’impliquent, dynamisent et/ou profitent du RQAP pour le meilleur de notre bilan migratoire. Amateurs de baby showers ou de blessing way, l’Abitibi-Témiscamingue est une terre d’accueil pleine de promesses pour vous!

À part le fait qu’elle consomme une généreuse quantité d’acide folique per capita, la jeunesse valdorienne est comme celle d’ailleurs; elle est allumée, innovante et fervente d’expérience exclusives. L’antonyme de tout ce qu’on peut ressentir dans un Tigre Géant. 

Depuis quelques années, une horde d’entrepreneurs divins a compris que tout ce qui n’existait pas chez nous était à inventer. L’avantage d’implanter un nouveau commerce à Val-d’Or est qu’il sera accueilli de façon héroïque; vous n’aurez jamais connu une ouverture d’un magasin de saucisses autant célébrée que celle qui a eu lieu sur notre allégorique 3e Avenue. Ce n’était pas sans rappeler le 30e anniversaire disco de la diva de Charlemagne. 

Ce qui fédère la jeunesse valdorienne en son sol, qui contribue à sa rétention, pour utiliser un terme paragouvernemental payant, c’est sa vie culturelle fumante qui nous rend bien fier, nous, les résistants du 48eparallèle. Effectivement, l’offre culturelle de Val-d’Or est consistante et diversifiée. Une impressionnante partie de celle-ci est d’ailleurs menée par des organismes sans but lucratif fondés par des bénévoles déterminés à dynamiser leur milieu de vie. Ce sont eux qui permettent à leur monde de faire du body surfing sur du Jason Bajada, d’exiger un pays à Bernard Adamus et de danser dans un igloo lumineux avec Valaire en plein hiver. 

La belle Val-d’Or, sortie de nowhere, un peu comme une fleur qui pousse dans l’ciment, grâce à des bâtisseurs, assurément tête de cochon, montre bien que la valeur d’un territoire ne se calcule pas en pots de confiture dans l’panier de produits régionaux.