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Être son propre boss

Édito publié le 6 février 2019

GE, TU, ELLES. L’éditorial de Geneviève Béland.
Quand pensez-vous?
Épisode spécial présenté au colloque « Être + qu’un Y » de la Chambre de commerce de Val-d’Or, le 6 février 2019.

« Être son propre boss », c’est comme l’ultime argument de consolation pour un entrepreneur.

« Je peux pas me permettre de fermer aux Fêtes, j’ai pas de fonds de pension ni d’assurance-salaire, mes relations d’amitiés sont fragilisées, ma maison est en garantie à la banque, MAIS, DIEU MERCI, JE SUIS MON PROPRE BOSS! » À quel point il faut avoir un trouble d’opposition pour sciemment balancer toute sa sécurité professionnelle par-dessus bord? Un move qui apparaît à première vue aussi infus que de choisir de faire Nez Rouge le 24. 

Pourtant, pour ma génération qui tient la liberté comme valeur cardinale, la génération Yolo, YouPorn et Yoga, les cadres définis sont plus étouffants que sécurisants. Les Y, élevés dans un décor de mélamine par leurs beaux-parents virtuels Marc-André Coallier, Stéphanie Couillard et Mario Bros, ont appris l’autonomie sur le tôt. Ceci expliquerait sans doute en partie pourquoi ils sont si rétifs à l’autorité. 

Ça expliquerait peut-être également pourquoi ils ne veulent pas sacrifier leur vie familiale pour le travail, comme l’ont fait leurs parents qui croyaient bien faire en leur attachant une clé au cou. Désormais, pour un Y, manquer la graduation de premier cycle du primaire du p’tit troisième pour le boulot est tout simplement irrecevable. De fait, qui prendrait la photo pour la mettre sur Instagram?

Justement, à cause de la grande importance que les jeunes accordent à leur vie personnelle, on les taxe souvent d’égoïstes. Toutefois, ils sont particulièrement soucieux des grands enjeux sociaux et environnementaux qui dépassent largement la ceinture de leur nombril. Ils adhèrent aussi tout naturellement aux nouveaux paradigmes du numérique, lesquels défient la logique compétitive du capitalisme traditionnel. En effet, les valeurs de partage et de collaboration du web transforment le visage du marché depuis déjà quelques années. En témoigneront Dr Dre et Metallica qui sont venus casser le party de Napster en 2001. 

Les entrepreneurs Y qui ne voudraient pour rien au monde être perçus comme de méchants capitalistes réinventent donc les règles du jeu. Des notions telles que le « capitalisme indie » et « l’entrepreneuriat social » commencent à prendre du terrain. Dans un article publié dans le périodique Nouveau Projet, Clément Sabourin déclare: « Face à une mondialisation sans états d’âme et à l’implacable concurrence des marchés émergents, la récente multiplication du «fait main», du local, des microentreprises et du financement particulier suscitent l’espoir. De jeunes entrepreneurs dessinent une nouvelle façon de produire et de consommer, plus humaine et plus viable. » 

Pour ce nouveau type de business-woman et man, l’impact social ou environnemental ne se substitue pas aux rendements financiers; il s’y ajoute. On cherche à répondre à des problèmes mondiaux par des solutions locales mais sans se mettre complètement en marge. 

Ainsi, ce tout frais modèle d’entrepreneuriat proposé par les Y en est un où on essaie de concilier travail et famille tout en défendant des valeurs de solidarité. Vu de même, c’est presque con que ce soit innovant.

Crédit photo: Marie-Claude Robert.